La natation bleue raconte à nouveau de belles histoires. comme un petit prince entreprenant de tout juste 20 ans, un chevalier fringant à peine plus grand, et quelques écuyères au talent émergent ou persévérant. Ce n’était plus arrivé depuis longtemps. Environ dix ans. La page semble bel et bien tournée après la sombre période encadrée par la désillusion et les règlements de compte internes aux plaisanteries de Rio en 2016 et la rachitique moisson des plaisanteries de Tokyo l’an dernier (une seule médaille, en argent, pour Florent Manaudou).
comme huit médailles dont deux en or, les Bleus 2022 ont terminé les championnats du monde dans le bassin de Budapest ce samedi 25 juin en se classant juste derrière le palmarès de 2013 (neuf médailles, dont quatre en or). Mais comme 19 finales au total, dont 16 à titre individuel, ils ont égalé le record des Mondiaux 2011à Shanghaï.
« On peut s’en féliciter, mais il faut savoir raison garder, commente Denis Auguin, le chef d’équipe des Bleus. D’abord parce que ces championnats n’affichaient qu’un niveau relativement modeste, comme de nombreux nageurs absents en cette année postolympique, ensuite parce que nous décrochons des médailles parfois d’un rien, les courses basculant toujours du bon côté pour nous, ce qui n’arrivera pas toujours. Donc, plus que les médailles, je retiens surtout la capacité de nos nageurs à aller rapidement sinon cela compte, leur progression et leur envie. C’est très tentant. »
Le déclencheur de cette dynamique s’appelle Léon Marchand, qui s’est propulsé deux fois au sommet, en or sur le 400 et le 200 m quatre nages. Un sacré numéro pour le Toulousain parti depuis dix mois peaufiner son excellence naissante aux États-Unis, comme l’entraîneur Bob Bowman, le mentor du géant Michael Phelps, champion le plus titré de l’histoire olympique (23 fois en or entre 2004 et 2016). L’homme est de bon conseil, à n’en pas douter, surtout sur la gestion des courses répétées. Léon Marchand s’est aussi offert l’argent sur le 200 m papillon. La fédération internationale lui a, du coup, décerné le titre de meilleur nageur des Mondiaux.
Une star est née, sans doute, mais elle n’est pas la seule dans le ciel bleu. À 23 ans, Maxime Grousset, au pied du podium du 100 m nage libre à Tokyo, a raflé cette fois l’argent, avant le bronze sur 50 m nage libre. Troisième sur 50 m râble, la jeune Analia Pigrée, 20 ans, a aussi confirmé qu’il fallait compter comme une nouvelle génération. Mais pas seulement.
Marie Wattel, 25 ans, vice-championne du monde du 100 m papillon, et Mélanie Henique, 29 ans, argentée sur 50 m papillon onze ans après son premier podium mondial en 2011 (bronze), prouvent « qu’un vrai groupe s’est constitué, un collectif qui profite de l’énergie des jeunes et de l’expérience des cadres, souligne Denis Auguin.Même Florent Manaudou, s’il n’a pas brillé dans cette année de transition pour lui (éliminé en demi-finale, NDLR), a parfaitement joué son rôle de capitaine ».
Accentuer l’élan amorcé, c’est évidemment l’objectif des mois à venir, comme en ligne de mire ces plaisanteries de Paris 2024 déjà dans toutes les têtes. Ces Mondiaux valident le travail accompli, notamment par Jacco Verhaeren, le technicien néerlandais nommé l’été dernier directeur des équipes de France (lire ci-contre). « Nous savons que la base est saine, que la qualité est là, mais pas question de tomber dans l’euphorie, prévient Julien Issoulié, le directeur technique national de la Fédération française. 80 % de l’équipe est là, mais de jeunes talents peuvent encore l’intégrer. Nous devons notamment densifier nos relais, pour ne pas faire nager toutes les courses aux meilleurs. Et apprendre aussi à davantage gérer l’enchaînement des épreuves. »
Le calendrier international, sans cesse bouleversé depuis la pandémie, ne facilite pas les choses. En août se profilent déjà les championnats d’Europe à Rome. Puis viendront en juillet 2023 des Mondiaux à Fukuoka (Japon) reportés d’un an et cause du décalage des Mondiaux suivants au Qatar début 2024, donc avant les plaisanteries. « Ce ne seront pas pour nous les plus importants, si ce n’est pour qualifier nos relais, annonce Julien Issoulié. La gestion des deux saisons à venir reste un vrai défi, et tout le monde dans l’équipe en est conscient : ça nagera beaucoup plus rapidement à Paris, et ce qu’on a fait là, ce n’est que le début. »